Comme beaucoup de gens, une partie de mon quotidien s’est transporté en travail à distance au cours de la dernière année. Je suis toutefois bien heureux d’avoir pu continuer à travailler « en présentiel » à différents degrés, lorsque je travaille en pharmacie.
Il est clair que le télétravail fut une arme précieuse pour se défendre contre la pandémie. Mais n’est-il pas temps d’avoir un débat plus profond sur le télétravail? Certes, on voit souvent des commentaires en faveur d’une meilleure conciliation travail-famille, de moins de temps perdu dans les embouteillages, etc… Sans compter les innombrables sondages cherchant à savoir qui est le vainqueur entre présentiel, hybride ou télétravail complet.
Pendant ce temps, j’ai l’impression qu’un enjeu plus profond est oublié: celui du lien entre notre intelligence et notre corps. En anglais, ça tombe dans le sujet nommé « embodied intelligence ».
En effet, l’évolution naturelle nous a amené à être qui nous sommes, morphologiquement et neurologiquement, en réponse à notre environnement. Partager un bureau, une salle de conférence ou une aire de travail avec des dizaines de gens, se regarder dans les yeux – ou pas, se rapprocher, s’éloigner, murmurer, crier, courir dans un corridor, ouvrir la porte à quelqu’un… Ce sont tant de petits gestes qui, à travers le dernier siècle, ont façonner, lentement mais surement qui nous sommes et qui nous devenons. La plupart de ceux et celles qui liront ce texte ont sans doute été exposés à cette réalité pendant plusieurs années! Pour ce groupe de personnes, les pantoufles du télétravail représentent un répit plutôt apprécié, à l’abri de ces forces évolutives parfois embêtantes.
Mais qu’en est-il de la prochaine génération d’humains, qui en raison du mouvement vers le télé-tout, n’auront peut-être pas été exposé à cette nature dans laquelle nous devons continuer à évoluer? Autrement dit, de quoi aurait l’air, morphologiquement et neurologiquement, l’être humain d’aujourd’hui s’il n’avait pas traversé la révolution industrielle et tout ce qui s’en est suivi?
"Human intelligence is not just the function of our brain, but a combination of our brain, our body, and the environment in which we exist." -a16z
J’ai personnellement l’impression que mes synapses ne sont pas alimentées par le même voltage lorsque je suis en train d’avoir une conversation en pharmacie, en comparaison à une discussion d’intensité égale sur une plateforme de visio-conférence. Sans aucun doute, ce stress de moindre intensité ne passe pas inaperçu aux yeux de mère nature.
Je ne dit pas qu’il faut jeter du revers de la main tout ce qu’offrent la technologie et le travail à distance. Mais le débat devrait, aujourd’hui, définitivement changer de registre. La nature des questions devrait s’élargir pour inclure ces enjeux qui, bien qu’ils ne nous concernent d’une façon aussi importante, sont d’une importance capitale pour les générations à venir.
Pour ceux intéressés à en entendre plus sur des recherches de pointe effectuées dans ce domaine, je vous réfère à ce balado passionnant de a16z.